mardi, juin 26, 2012

"Histoire de la Tunisie" par Habib Boulares : L’histoire ennuyeuse


Sorti le 20 février 2012 à grand renfort de publicité et d’interventions médiatiques, le nouveau livre de Habib Boulares : « Histoire de la Tunisie » avait pour ambition d’être une introduction aux 2000 ans d’histoire de la Tunisie.  Etait-ce trop ambitieux ?

 L’auteur, à travers les 700 pages que compte le livre, nous emmène au pas de course d’évènement en évènement, de récit en récit et de date en date. Il se borne ainsi à parler d’acteurs, de faits et de dates.  Le problème de cette approche hyper factuelle est qu’on est vite lassé par cette histoire événementielle, saccadée et décousue. L’Histoire ne se résume pas uniquement à la récitation d’une liste d’évènements et de dates,  comme une douce musique, une litanie d’érudition. Se limiter à cette histoire-là est un constat d’échec, dû à la fois à une certaine forme de paresse et à un problème d’approche de la matière historique.
Car l’Histoire, n’est pas seulement l’évènement, elle est aussi le contexte et le creuset. Narrer un évènement sans décrire ce qui lui a donné naissance, à savoir une culture, une religion, une coutume ou une mentalité vide ce dernier de sens et nous prive de sa compréhension profonde.

Je me souviens encore de ces cours d’Histoire longs et ennuyeux au lycée où le prof venait nous réciter des dates et nous faire lire des « sources ». Cette histoire-là, intangible n’était aimée de personne.  Car, il lui manque l’essentiel : la passion.  

Et c’est bien cette passion qui manque elle aussi si cruellement au livre de Habib Boulares. Cette passion de narrer le passé sans lasser, celle de nous faire voyager à travers les âges à la découverte des coutumes, des sociétés, des villes, des architectures, des monuments, des croyances et de la politique d’autrefois.

Finalement, on ne niera cependant pas certaines qualités du livre : sa richesse iconographique, sa maquette claire et aérée et sa une chronologie exhaustive, mais cela ne compense pas la faiblesse du contenu.

Alors oui, on achètera ce livre, mais ne comptez pas sur lui pour vous faire aimer l’Histoire.

mardi, février 14, 2012

L’excision, pratique étrangère à l’Islam


Au cœur de la visite de cet étrange Ghoneim, prédicateur salafiste égyptien en Tunisie, et au moment où ses déclarations farfelues promouvant l’excision émeuvent et scandalisent la rue, il convient de s’attarder un peu sur cette pratique barbare. Car il faut  comprendre ses origines pour mieux la combattre et ainsi éclairer, un tant soit peu certains esprits embrumés par un discours violent, rétrograde et surtout faux.

L’excision, une pratique pré islamique
Pour commencer, il faut souligner que l’excision féminine (khafd) n’a aucun fondement dans le Coran et aucun verset ne la cite explicitement ou implicitement. Et si certaines écoles juridiques la recommandent sous une forme bénigne, elles se fondent toutes sur des hadidh dont aucun ne la prescrit explicitement.
La pratique était répandue dans la Jahilia, le droit islamique s’est ainsi contenté d’entériner un usage pré islamique. Elle a aujourd’hui quasiment disparu partout dans le monde musulman sauf en Egypte (où elle est également réalisée par certains coptes) et dans certaines régions de l’Afrique subsaharienne.
Ces dernières années, un grand effort a été déployé par des ONGs dans les pays où cette pratique est courante afin de sensibiliser les familles et surtout les femmes sur les dangers de cette pratique.
Car au delà du risque très important de complications médicales chroniques que peut entrainer l’excision, elle génère également un impact psychologique dévastateur sur les jeunes filles, ces futures femmes.
Violées dans leur intimité, amputées d’une partie de leurs corps, cette pratique peut être perçue comme une mutilation d’origine masculine : une sorte d’affirmation de la domination machiste sur la femme. Car in fine ce qui est recherché par l’excision, c’est bien priver la femme de tout plaisir durant l’acte sexuel. Elle est ainsi, réduite, un peu plus encore au rôle d’objet sexuel pour l’homme, dévolue à ses envies et incapable elle même de ressentir le moindre plaisir.
Exciser une femme c’est enlever, détruire, nier une partie de son humanité, car la capacité de ressentir du plaisir est sans doute l’une des manifestations les plus criantes de notre humanité. L’homme n’est-il pas cet animal éprouvant du plaisir.


Plus largement, il convient de rappeler, qu’autant que l’excision, la circoncision n’a, elle non plus, aucun fondement en Islam, ni dans le Coran, ni dans les hadhith. Là aussi, c’est un lourd lég de la Jahilia que la tradition islamique a simplement perpétué et que la tradition populaire et le lieu commun a associé à la fois à un rite de passage, à une purification et à une entrée dans la communauté des croyants. La pratique peut également chez certains hommes être la source de grands troubles psychologiques et il aujourd’hui prouvé qu’elle réduit sensiblement le plaisir éprouvé lors du coït. Mais le débat ici est tout autre tant cette pratique est enracinée dans la conscience populaire.

Pour finir, le constat est alors toujours le même et la conclusion inchangée. Le plus grand danger pour l’Islam, ce sont les musulmans eux mêmes, ou du moins, une partie de ces derniers. Obnubilés par une surenchère de la démonstration de foi, ils sont prêts à croire tout et n’importe quoi. Et plus c’est gros, plus c’est violent, plus cela doit, à leur yeux être vrai. L’islam n’est pas cela, il est avant tout compréhension de l’essence du texte et guide. L’islam a aujourd’hui, un terrible besoin de réflexion, de contextualisation et de recul, loin des prêches de prédicateurs incultes et violents.