Le débat épineux sur l’exclusion des anciens cadres de l’ex-RCD et des hauts fonctionnaires gouvernementaux des différents gouvernements Ben Ali sur les 23 dernières années agite toute la sphère politique tunisienne depuis son adoption par la Haute Instance pour la Réalisation des Objectifs de la Révolution, des Réformes Politiques et de la Transition Démocratique (HIRP).
Beaucoup présentent cette disposition comme nécessaire et obligatoire pour calmer la fureur populaire et comme une sanction permise contre les serviteurs de la dictature. Sauf qu’il serait bien légitime également de se poser les questions suivantes : Quelle est la légitimité de ces punisseurs ? De quel droit se permettent-ils de se substituer à la justice ? Comment peut-on bafouer la présomption d’innocence avec si peu d’égards ?
Aussi légitimes que peuvent paraître ces questions, il me semble important de recentrer le débat autour des idéaux et des principes. Il faut à mon avis, dans ce contexte postrévolutionnaire, savoir laisser les sentiments de côté et réfléchir en termes d’idéaux. Car comment peut-on se prétendre être meilleurs que les anciens serviteurs de la dictature en usant des mêmes moyens d’exclusion ? Comment peut-on insulter l’intelligence du peuple tunisien qui, certainement, ne votera pas pour ces gens ? Cette exclusion n’est-elle finalement pas un aveu de faiblesse vis à vis de ces gens ? Si l’on n’avait pas peur de leur influence, pourquoi les exclure ?
Bâtir une démocratie c’est mettre les principes avant toute autre considération, c’est consacrer un idéal au risque d’y laisser une part de sa fierté et de son envie de vengeance.
Aujourd’hui, plus que jamais soyons exemplaires ! Montrons ce qu’est la réelle démocratie : une démocratie bâtie sur la liberté de participation de chacun et ne nous substituons pas au verdict populaire qui est seul juge. Laissons ces gens se présenter et laissons les recevoir la sanction populaire qui leur est prévue. Car seule la sanction populaire est légitime.
Transition démocratique, réforme de la justice, changement des mentalités… les défis sont énormes, soyons donc à la hauteur de la responsabilité historique qui nous incombe. Sachons être meilleurs que ceux qui nous ont oppressés. Sachons être un exemple pour le futur. Sachons montrer notre maturité et notre sagesse. Et ayons confiance dans jugement populaire.
Le gouvernement temporaire devrait faire connaître sa position sur la question vendredi prochain, et s’il décide d’amender les termes de cette exclusion, jouera une partie de poker politique très risquée. Car, finalement, quelque soit le sens de sa décision, elle risque de faire beaucoup de mécontents. Espérons seulement qu’on saura maintenir le débat au niveau des principes et non sur celui de la vengeance et de la vindicte.
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